Publié le 07 avr 2021Lecture 3 min
L’hyper-inflammation de la Covid-19 et la maladie post-Covid-19 peuvent avoir leurs origines dans le syndrome d’activation mastocytaire
Habib CHABANE, Paris
Afrin LB et al. Covid-19 hyperinflammation and post-Covid-19 illness may be rooted in mast cell activation syndrome. Int J Infect Dis 2020 ; 100 : 327-32.
Environ 15 à 20 % des patients ayant contracté l’infection par la Covid-19 souffrent d’une forme grave ou d’une évolution longue de l’infection (maladie post-Covid). Plusieurs comorbidités (âge avancé, obésité et/ou maladie chronique préexistante) ont été identifiées comme facteurs de risque, mais la cause réelle de ces formes évolutives n’est pas élucidée. Lors de l’infection, les mastocytes sont activés par le SARS-CoV-2. Le syndrome d’activation (SAMA), qui peut être associé à la clonalité acquise des mastocytes (SAMA clonal), est un trouble multisystémique chronique dont la prévalence estimée à 17 %(1). Les auteurs de cet article décrivent une nouvelle hypothèse expliquant comment le SAMA pourrait faciliter une infection aiguë grave à Covid-19 et la maladie post-Covid-19.
Les auteurs ont comparé les observations de la maladie Covid-19 chez les patients avec et sans SAMA. Ils ont observé que la prévalence du SAMA dans la population générale est similaire à celle des formes graves Covid-19 au sein de la population infectée par le SARS-CoV-2. L’hyper-inflammation associée aux formes graves de la Covid-19 est semblable à l’inflammation consécutive à l’activation mastocytaire. La tempête cytokinique associée à l’infection par le SARS-CoV-2 est caractérisée par une prolifération rapide et une hyperactivation des lymphocytes T, des macrophages, des cellules NK et la surproduction de plus de 150 cytokines et médiateurs pro-inflammatoires libérés par les cellules immunitaires ou non immunitaires (épithéliums et/ou endothélium endommagés). La tempête de cytokines hyper-inflammatoires chez les patients souffrant de symptômes graves pourrait avoir pour origine une réponse atypique au SARS-CoV-2 des mastocytes hyperactivés du SAMA.
Les mastocytes peuvent être activés par les virus grâce à des récepteurs TLR3, S1P* et RIGI** qui reconnaissent l’ARN viral. Ils expriment également l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2, principal récepteur du SARS-CoV-2, qui explique que les mastocytes peuvent héberger ce virus. Ils expriment aussi de nombreuses sérine protéases (dont la tryptase), nécessaires à la diffusion de l’infection par le SARS-CoV-2. Lorsqu’ils reconnaissent les antigènes viraux, les mastocytes sont activés et synthétisent de nombreuses chimiokines et cytokines qui à leur tour recrutent d’autres cellules inflammatoires. Outre les formes aiguës graves d’infection par la Covid-19, la maladie post-Covid-19 serait une forme d’évolution naturelle du SAMA selon ces auteurs ; comme cela peut se voir avec le SAMA associé à l’infection chronique par EBV ou par la borréliose dans la maladie de Lyme chronique.
Les auteurs relèvent un certain nombre de similitudes entre le SAMA et les formes graves de l’infection par la Covid-19 ou la maladie post-Covid (Covid long). La prévalence des formes graves d’infection par la Covid19 (15-20 %) dans les pays développés est similaire à celle du SAMA (17 %). Un nombre important de cas mortels d’infection par la Covid-19 sont liées à des complications thrombo-emboliques, septicémie et défaillance multi organique. Il est reconnu que les mastocytes jouent un rôle important dans la physiopathologie des maladies thrombotiques et que la stabilisation des mastocytes aide à prévenir une septicémie mortelle. Les troubles neurologiques et neuropsychiatriques semblent fréquents à la fois dans le SAMA et dans la maladie Covid-19. Les auteurs supposent que les symptômes neuropsychiatriques peuvent être davantage dus à une aggravation (probablement préexistante) du SAMA.
Les auteurs ont observé que les médicaments qui contrôlent l’activité des mastocytes ou leurs médiateurs ont été utiles chez les patients souffrant d’infection par la Covid-19. Certains médicaments ou classes de médicaments se sont avérés au moins provisoirement utiles pour moduler la gravité de l’infection par la Covid-19, telle la famotidine(2), les antileucotriènes, le cromoglycate, les flavonoïdes et l’inhibiteur de Janus kinase (JAK), médicaments dont les actions antivirales semblent extrêmement improbables. L’action de ces médicaments inhibe l’activation des mastocytes ou bloque les médiateurs qu’ils libèrent. Aucun des patients souffrant de SAMA traités par les auteurs pour infection par la Covid-19 n’a souffert de forme grave ou fatale.
Si elle est prouvée, cette théorie a des conséquences thérapeutiques et pronostiques significatives pour lutter contre les formes graves ou longues d’infection par la Covid-19.
*Sphingosine-1-phosphate virale
**Gène I induit par l’acide rétinoïque de l’ARN viral non encapsulé
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