Publié le 05 fév 2021Lecture 4 min
Comment prendre en charge un premier épisode de bronchiolite aiguë chez un nourrisson de moins de 12 mois ?
Julie MAZENQ, Service de pneumologie pédiatrique du Pr Chabrol et Pr Dubus, CHU Timone enfants, Marseille
La bronchiolite aiguë (BA) du nourrisson est une pathologie virale, épidémique, très fréquente qui nécessite un recours massif aux soins et est responsable de nombreuses hospitalisations. En 2009, l’institut de veille sanitaire rapportait un taux d’hospitalisation de 35,8/1 000 nourrissons de moins de 12 mois et un taux de mortalité de 0,08 %. En partenariat avec le Conseil national professionnel de pédiatrie, la Haute Autorité de santé a élaboré une recommandation de bonne pratique qui a été publiée avant l’épidémie 2019-2020(1).
La définition d’une BA du nourrisson est un premier épisode aigu de gêne respiratoire avant 12 mois débutant par une rhinite suivie de signes respiratoires : toux, sibilants et/ou crépitants, accompagnés ou non d’une polypnée et/ou de signes de lutte respiratoire. Cet épisode peut survenir à toute période de l’année. Il est important de toujours évoquer les autres causes de détresses respiratoires particulièrement chez le nouveau-né (infection néonatale bactérienne précoce et tardive, insuffisance cardiaque, etc.). Devant un 2e épisode rapproche, chez le nourrisson de moins de 12 mois, il sera nécessaire d’envisager d’autres diagnostics en prenant en compte d’autres paramètres tels que l’âge, les antécédents (asthme, allergies) et les symptômes associés.
Niveaux de gravité
Trois stades de gravité de la maladie ont été définis à partir de l’interrogatoire et de l’évaluation clinique sous la forme d’une check-list en prenant en compte les facteurs de vulnérabilité (âge corrigé, comorbidité et facteurs environnementaux) (tableau 1) et les paramètres cliniques (tableau 2). Ces 3 niveaux de gravité sont assortis de modalités de prise en charge graduée allant de la surveillance active au domicile jusqu’à l’hospitalisation, si nécessaire vers une unité de soins intensifs/réanimation (tableau 3).
Examens complémentaires
Aucun examen complémentaire systématique n’est indiqué. Il peut être discuté une radiographie thoracique de face dans les formes les plus graves ou à visée de diagnostic différentiel.
Prise en charge
La prise en charge repose donc avant tout sur la désobstruction des voies aériennes supérieures. Il est également nécessaire de maintenir un apport calorique adapté aux besoins du nourrisson : fractionnement alimentaire ou alimentation entérale en 1re intention avec une sonde naso-gastrique en cas d’apports < 50 % sur 3 prises consécutives(2). La position proclive longtemps recommandée n’a pas été prouvée dans la littérature ; il est nécessaire de rappeler aux parents les recommandations de couchage en décubitus dorsal pour la prévention de la mort inattendue du nourrisson. Dans la grande majorité des cas, le recours hospitalier n’est pas nécessaire. Il faut être vigilant durant les 48 premières heures du début des symptômes respiratoires, période durant laquelle tout nourrisson est susceptible de s’aggraver, et en particulier, s’il existe des critères de vulnérabilité ou environnementaux. Le recours à l’oxygénothérapie est recommandé dans les formes modérées si la SpO2 est < 91 % à l’éveil et 90 % au sommeil. Dans les formes graves, l’indication est pour une SpO2 < 94 %(3). La surveillance en continu de la SpO2 par oxymétrie de pouls n’est recommandée que dans les formes graves et pour les nourrissons nécessitant de l’oxygène. Dans les autres cas, une surveillance discontinue doit être proposée. La valeur cible recommandée pour le sevrage en oxygène est une SpO2 ≥ 92 % chez un nourrisson en état stable, sans comorbidité respiratoire et en l’absence de désaturations brutales fréquentes (> 3/heure). En cas de non-amélioration ou d’aggravation sous oxygène, il est recommandé de modifier le support respiratoire par une CPAP ou des lunettes à haut débit à 2 l/kg/min, sans supériorité actuelle prouvée de l’une des deux techniques(4). Les données de la littérature ne permettent pas de retenir les indications parmi l’arsenal thérapeutique proposé. Aucun traitement médicamenteux n’a montré son efficacité dans la prise en charge de la BA, de même que la kinésithérapie respiratoire de désencombrement bronchique. Chez les nourrissons hospitalisés, la kinésithérapie de désencombrement bron chique n’a pas montré de bénéfice(5). En ambulatoire, les études sont de faibles effectifs et/ou avec des critères de jugement non adaptés, nécessitant une étude nationale de bonne qualité méthodologique(6).
Prévention et éducation à la santé
Le groupe de travail a souligné l’importance de la participation active des professionnels de santé pour la réévaluation des nourrissons et l’éducation thérapeutique des familles, notamment leur aide à la désobstruction des voies aériennes supérieures et l’apprentissage de la reconnaissance des signes conduisant à consulter un médecin en urgence, ainsi que les recours d’urgence possibles dans leur territoire de sante.
Évolution naturelle
La phase aiguë de la maladie dure en moyenne 10 jours, avec une toux résiduelle isolée pouvant durer jusqu’à 4 semaines. En cas d’évolution inhabituelle avec la persistance de signes respiratoires au-delà de 4 semaines, il est recommandé d’adresser le nourrisson à un pédiatre ou pneumo-pédiatre.
Conclusion
• En pratique, nous retiendrons que les recommandations de 2019 définissent la BA comme un premier épisode de dyspnée chez un nourrisson de moins de 12 mois.
• La recherche des critères de gravité clinique, de vulnérabilité et d’environnement permet de classer la gravité de la BA et de définir le niveau de recours aux soins.
• La prise en charge repose avant tout sur une désobstruction rhino-pharyngée et un fractionnement alimentaire.
• Une surveillance active et une éducation des familles sont primordiales dans cette pathologie épidémique fréquente.
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