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Allergologie

Publié le 04 nov 2024Lecture 5 min

Rhinite allergique : quoi de neuf dans la prise en charge ?

Denise CARO, Boulogne-Billancourt - D’après le symposium « La rhinite allergique en pratique : quelles nouveautés ? »

Avec, selon les études, 20 % à 30 % de la population atteinte, la rhinite allergique est une pathologie très fréquente et en constante augmentation du fait du changement climatique. Les saisons polliniques sont plus précoces et plus longues, le pollen est plus allergisant (renfermant davantage d’allergènes) ; la sécheresse majore la concentration de pollen dans l’air et le vent le transporte au loin(1,2). Dès lors, il est utile de rappeler les principaux éléments clés de la prise en charge de la rhinite allergique en 2024.

Bien que très fréquente, la rhinite allergique n’est pas la seule cause de symptômes nasaux. Aussi, avant d’affirmer le diagnostic et de débuter un traitement, il faudra avoir éliminé les diagnostics différentiels et recherché d’éventuelles pathologies associées. L’interrogatoire en amont des tests cutanés est essentiel de ce point de vue. « Une rhinorrhée unilatérale n’est pas une allergie », a insisté le Pr Louis Crampette (ORL, Montpellier). Si en plus le patient mouche du pus ou du sang, on pensera à un adénocarcinome ethmoïdal à adresser rapidement à l’ORL. De même une rhinorrhée claire unilatérale positionnelle doit faire évoquer une rhinorrhée cérébro-spinale, autre urgence à orienter sans attendre. D’autres fois, la clinique ne correspond pas pleinement à une rhinite allergique. On recherchera : une polypose naso-sinusienne (anosmie), une déformation septale (obstruction nasale isolée), une sinusite infectieuse (cacosmie, suppuration, douleur) ou une vascularite (avec deux tableaux cliniques possibles : soit croûtes, épistaxis, cacosmie, soit polypose floride avec une atteinte cutanée, cardiaque et/ou neurologique). Dans un certain nombre de cas, ces pathologies peuvent être associées à une rhinite allergique, chacune nécessitant un traitement adapté. Concernant la prise en charge thérapeutique, la Société française d’ORL (SFORL) a émis des recommandations(3). Outre l’éviction des allergènes, le traitement est fonction de la fréquence et de la sévérité des symptômes pour lesquelles l’ARIA (Allergic Rhinitis and its Impact on Asthma) propose une classification. Une RA est dite intermittente, si les symptômes surviennent moins de 4 jours par semaine ou moins de 4 semaines par épisode ; des symptômes plus pérennes correspondent à une RA persistante. Les répercussions de la RA sur le sommeil, le travail ou la scolarité, l’activité quotidienne et la gêne occasionnée par les symptômes définissent la gravité(4).   QUEL TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE CHOISIR ?   Pour une RA légère à modérée, les antihistaminiques (anti-H1) oraux de 3e génération (avec un meilleur rapport bénéfice/risque) sont prescrits en première intention. En cas de symptômes plus importants (RA modérée), l’administration de corticoïdes intranasaux (CIN) est recommandée d’emblée. Et si les symptômes de la RA restent insuffisamment contrôlés, chez l’adulte on doublera la dose pour une meilleure efficacité sans modification de la tolérance. Enfin, si la monothérapie ne suffit pas, on peut prescrire une association fixe CIN/anti-H1. L’éducation thérapeutique est fondamentale afin d’expliquer au patient comment faire une pulvérisation nasale et de vérifier la bonne observance avant toute modification thérapeutique. Les antileucotriènes n’ont pas de place en monothérapie et en première intention dans la RA ; ils peuvent être prescrits en 2e ligne(3). Chez l’enfant à partir de 3 ans, les CIN sont prescrits en première intention en cas de RA perannuelle. L’usage des anti-H1 par voie orale de dernière génération est la seule solution entre 1 et 3 ans. Ils peuvent être une alternative à la CIN après 3 ans si la voie orale est préférée par la famille ou être administrés en association avec les CIN (un niveau de preuve bas)(3). « Le niveau de preuve des traitements relève surtout de l’expérience » ; a noté le Pr Laurent Guilleminault (pneumo-allergologue, Toulouse). Les anti-H1 oraux ou intranasaux sont moins efficaces que la CIN, cependant ils donnent des résultats satisfaisants chez de nombreux patients avec une RA modérée qui préfèrent la voie orale. Les anti-H1 nasaux sont moins efficaces que la CIN. La combinaison fixe CIN/antiH1 intranasal peut être utile dans la RA modérée à sévère. Enfin, la comparaison entre les anti-H1 oraux et intranasaux aboutit à des résultats variables qui ne permettent pas de conclure. Et bien que souvent utilisée, l’administration conjointe d’anti-H1 oral et d’un CIN ne fait pas mieux que le CIN seul(4). « Il faut tenir compte des préférences des patients », a ajouté le Pr Guilleminault. Une fois le traitement mis en route, il faut l’évaluer, en se méfiant de la subjectivité des réponses des patients. L’EVA est utile : inférieure à 5/10 on continue le traitement, supérieure à 5/10 on l’intensifie. Un score de symptômes, un score de médication ou un score combiné symptômes, médication et qualité de vie peuvent aussi être utilisés(5,6). « Il est intéressant d’évaluer la RA avant et après traitement », a précisé le Pr Guilleminault.   LES BONS RÉSULTATS DE L’ITA   À côté des traitements symptomatiques, l’intérêt d’une immunothérapie allergénique sublinguale (ITA) mérite d’être souligné. Selon une métanalyse, elle diminue significativement le recours aux traitements symptomatique chez les patients avec RA saisonnière(7). Intérêt confirmé dans une autre métanalyse prenant en compte les RA tout venant avec une amélioration significative du score de symptômes (-0,49 vs placebo ; p < 0,0001) et du score de médication (-0,32 ; p < 0,0001)(8). Le bénéfice de l’ITA chez les patients atteints de RA semble dépasser l’amélioration des symptômes. En effet, des données indirectes portant sur des études rétrospectives ou de cohorte indiquent que l’ITA prévient le développement d’un asthme chez des patients avec une RA sans asthme(9). « Le bénéfice est particulièrement net chez l’enfant, l’ITA permet d’investir pour l’avenir de sa santé », a déclaré le Pr Guilleminault. Enfin l’ITA améliorerait la défense antivirale chez les patients allergiques. On observe une augmentation de l’IFN-ß sur le plan transcrit et protéique et de l’interféron-Δ au niveau de l’épithélium bronchique après désensibilisation. Il est possible que l’effet soit le même au niveau de l’épithélium nasale, mais cela reste à démontrer(10). Autre piste de recherche intéressante, le lien entre les marqueurs de l’inflammation T2 (éosinophiles, IgE totales et tryptases) et le niveau de la réponse à l’ITA. Les patients asthmatiques qui ont des taux élevés d’éosinophiles avant la désensibilisation, répondent mieux que les autres au traitement ; leur taux d’éosinophiles progresse moins, alors qu’il s’élève fortement chez les patients sous placebo(11,12). « Toutefois l’utilisation de ces biomarqueurs pour évaluer la réponse à l’ITA n’a pas de répercussion pratique pour le moment », a affirmé le Pr Guilleminault. D’après le symposium « La rhinite allergique en pratique : quelles nouveautés ? » avec le soutien du laboratoire Zambon et avec la participation du Pr Laurent Guilleminault (Toulouse), du Pr Louis Crampette (Montpellier) et du Dr Édouard Sève (Fontainebleau) CFA 2024

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