Publié le 09 mar 2009Lecture 6 min
Voir jusque dans les alvéoles. La microscopie confocale du tissu alvéolaire pulmonaire et des bronches ou broncho-alvéoscopie
L. THIBERVILLE, CHU de Rouen
Appliquée à la sphère respiratoire, la microscopie confocale en fluorescence utilise des fibres optiques qui sont non seulement capables de visualiser la microscopie de la bronche proximale, mais peuvent également atteindre les voies aériennes les plus distales, c’est-à-dire les canaux alvéolaires et les sacs alvéolaires. À terme, elle devrait remplacer la biopsie pulmonaire chirurgicale.
Un peu de technique La microscopie confocale fibrée en fluorescence est développée par la société française Mauna Kea Technologies (Paris). Son principe repose sur celui de la microscopie confocale qui permet d’obtenir une imagerie microscopique dans un plan perpendiculaire à celui de l’optique, et à différents niveaux de profondeur. Le procédé utilise à la place de l’objectif du microscope un trousseau de fibres optiques compactées les unes contre les autres, à l’intérieur d’une mini sonde dont le diamètre externe peut descendre jusqu’à un millimètre. Chacune de ces microfibres est parcourue à un instant donné par le faisceau laser selon un mode de balayage très rapide ; l’ensemble des fibres est parcouru entre 9 et 12 fois/seconde. Ce faisceau laser va illuminer le tissu et les fibres vont, dans le même temps, recueillir la fluorescence émise par celui-ci en quelques nanosecondes. Cette technologie permet ainsi d’obtenir une imagerie de contact, en temps réel, in vivo. Un élément important de la compréhension du système est que celui-ci ne peut analyser que les structures ayant des propriétés de fluorescence. On peut ainsi obtenir deux types d’images : soit une image en autofluorescence reposant sur les structures qui réagissent spontanément à un éclairage donné (par exemple, les fibres d’élastine éclairées par un laser bleu à 488 nm), soit l’image d’un fluorophore exogène appliqué en topique (le bleu de méthylène) ou injecté par voie intraveineuse (la fluorescéine). Quelle est l'utilité de la microscopie confocale en pathologie respiratoire L’exploration de la bronche proximale : vers une biopsie optique in-vivo Dans une première application, un tel système permet de réaliser l’imagerie microscopique in vivo d’un épithélium bronchique sur la bronche proximale. La sonde est dans ce cas posée sous contrôle de la vue, sur un site d’apparence pathologique en examen macroscopique, éventuellement ciblé par une endoscopie en autofluorescence. Après éclairage à 488 nm, l’imagerie en autofluorescence microscopique confocale de la bronche est essentiellement celle de la membrane basale sous-épithéliale. Celle-ci est bien visible jusqu’au niveau des bronches segmentaires les plus distales sous forme d’un fin réseau interrompu par les orifices des glandes bronchiques (figure 1).Ce réseau fibré de la membrane basale, qui est fait essentiellement d’élastine, voit sa structure altérée au contact de lésions prénéoplasiques. Cependant, l’imagerie de la couche épithéliale proprement dite n’est pas visible en autofluorescence du fait de l’absence de fluorophore suffisamment puissant dans les cellules épithéliales. On a alors recours à l’application locale en topique du bleu de méthylène et à l’utilisation d’une longueur d’onde d’excitation différente (dans le rouge, à 660 nm). Cette technique permet la visualisation de la couche épithéliale et ses altérations au cours des maladies néoplasiques. Ce domaine fait l’objet d’une recherche très active qui pourrait permettre, à terme, de différencier un épithélium sain d’un épithélium pathologique et d’en déterminer les limites au plan microscopique (figure 2). Cet examen microscopique de la bronche proximale est parfois appelé aussi « biopsie optique » quoique l’aspect microscopique visualisable soit bien différent de l’examen anatomopathologique traditionnel, ne serait-ce que parce que l’épithélium est vu du dessus et non pas en coupes perpendiculaires à l’épithélium comme en ont l’habitude les anatomopathologistes. Figure 1. Aspect d’une bronche saine. Figure 2. Cancer sur bronche : couche épithéliale altérée. L’exploration des espaces aériens distaux : un endoscope pour alvéoles La deuxième application de la microscopie confocale fibrée pour l’exploration des pathologies respiratoires tire partie de la très petite taille de la fibre utilisée (1 millimètre de diamètre), qui peut alors être poussée audelà de la vision endoscopique traditionnelle jusque dans les territoires alvéolaires distaux. Cette technique permet d’explorer alors les alvéoles pulmonaires in vivo, telles qu’elles n’avaient jamais été jusqu’à présent visualisées chez l’homme. Ici aussi, l’imagerie principale est faite des fibres d’élastine dont l’organisation tridimensionnelle dessine un échafaudage qui soustend l’organisation des canaux alvéolaires et des bouches alvéolaires et entoure les microvaisseaux extracapillaires (artérioles et veinules) du poumon profond (figure 3). Chez le fumeur, l’imagerie est plus particulière du fait du dépôt, dans les espaces aériens distaux, des goudrons de la fumée de tabac qui sont eux-mêmes très fluorescents lorsque éclairés en lumière bleue. Le goudron de tabac se répand alors sur les parois alvéolaires et à l’intérieur des macrophages alvéolaires, permettant d’obtenir une image très spécifique chez le fumeur et d’étudier ainsi l’intensité de l’alvéolite macrophagique (figure 4). L’utilisation de la microscopie confocale fibrée en fluorescence pour l’exploration des territoires alvéolaires in vivo a pris le nom de broncho-alvéoscopie ou alvéoscopie. La technique est parfaitement indolore et peu invasive. Ainsi, sur plus de 150 patients explorés au CHU de Rouen, aucun effet secondaire ou événement indésirable n’est survenu. La broncho-alvéoscopie permet d’obtenir une imagerie reproductible et mesurable des bouches alvéolaires, des microvaisseaux ainsi que des macrophages alvéolaires chez le fumeur. Là encore, une recherche active est menée de façon à identifier les altérations du réseau élastique qui pourraient être spécifiques d’une pathologie donnée, avec pour objectifs d’éviter un certain nombre de biopsies pulmonaires chirurgicales et de permettre, à l’avenir, de suivre les pathologies dans le temps de façon non invasive. Figure 3. Alvéole pulmonaire saine. Figure 4. Alvéole pulmonaire chez un fumeur. Conclusion La microscopie confocale fibrée en fluorescence est une technique innovante dont les pneumologues espèrent beaucoup à l’avenir, non seulement pour l’exploration des bronches proximales dans le domaine de la cancérologie, mais également pour l’exploration peu invasive des territoires alvéolaires pulmonaires. Cette technique s’appliquera alors singulièrement aux pathologies infiltrantes diffuses du poumon mais aussi aux nodules pulmonaires périphériques.
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