Publié le 25 mar 2024Lecture 4 min
Exploration de l’hyperréactivité bronchique dans l’asthme
Catherine FABER, d’après la communication de C. Barnig, Besançon, CPLF 2024
L’hyperréactivité bronchique (HRB) a une prévalence élevée dans la population générale (de 5 % à 20 % selon les études) et encore plus chez les fumeurs (20 à 60 %). Elle est associée à l’asthme, mais aussi à d’autres pathologies, notamment la rhinite chronique et la bronchopneumopathie chronique obstructive.
Cette caractéristique majeure de l’asthme relève d’une composante variable liée à un environnement pro-inflammatoire induit par des allergènes, des infections respiratoires ou un traitement et d’une composante persistante en rapport avec des modifications structurelles, ou remodelage, caractérisées par un épaississement subépithélial, une hypertrophie du muscle lisse, un dépôt de collagène et des modifications vasculaires. Une composante intrinsèque, génétique, a aussi été incriminée dans l’HRB avec probablement une majoration de la contractilité du muscle. Le poids de chacune de ces trois composantes est plus ou moins important selon le phénotype.
Les tests de provocation par des agents pharmacologiques, des stimuli physiques ou des allergènes permettent une mesure fonctionnelle de la réponse bronchomotrice. Ils peuvent être classés en fonction des mécanismes : les tests directs entraînent une stimulation directe via des récepteurs situés sur la musculature bronchique lisse – récepteurs muscariniques pour la méthacholine – et les tests indirects agissent par des voies intermédiaires impliquant des cellules inflammatoires et neuronales qui libèrent des médiateurs de la bronchoconstriction. Ces derniers sont plus spécifiques, mais moins sensibles que les tests directs.
LE TEST À LA MÉTHACHOLINE EN PRATIQUE
La méthacholine est le principal agent pharmacologique utilisé en pratique clinique. Elle est administrée par inhalation à l’aide d’un nébuliseur dosimétrique, à des doses croissantes par paliers de 2 à 3 minutes jusqu’à une dose cumulée minimum de 1 600 µg(1). Beaucoup de laboratoires vont au-delà, jusqu’à 2 400 µg ou 3 200 µg voire plus. Une spirométrie est réalisée avant puis à chaque palier. Le test est considéré comme positif en cas de diminution de 20 % ou plus du VEMS. Le résultat est exprimé de dose provocante (DP20).
Le test doit être réalisé dans un laboratoire expérimenté et est contre-indiqué en cas de VEMS inférieur à 50 %-60 %. Il nécessite l’arrêt des bronchodilatateurs de courte durée d’action au moins 6 heures avant le test et 12 heures pour ceux de longue durée d’action. L’arrêt des corticostéroïdes inhalés (CSI) reste débattu. Il faut en tenir compte lors de l’interprétation des résultats, qu’ils soient arrêtés ou non.
En considérant le seuil de 1 600 µg, la sensibilité du test à la méthacholine pour le diagnostic de l’asthme est proche de 100 %. Elle est légèrement moins bonne chez les patients en période asymptomatique et en cas de traitement pas CSI (10 à 20 % de faux négatifs). On peut raisonnablement exclure un asthme chez un patient symptomatique sans CSI en cas de test à la méthacholine négatif. La valeur prédictive positive de ce test est d’environ 50 % si la DP20 est inférieure à 1 600 µg et de l’ordre de 90 % si elle est inférieure à 200 µg. Elle diffère à la fois selon le DP20 et la probabilité prétest d’asthme. Quand celle-ci est très importante, le diagnostic d’asthme est quasiment sûr.
On sait par exemple qu’en présence de sifflements avec dyspnée, la sensibilité et la spécificité de ce test sont de respectivement 80 et 90 %. Le diagnostic d’asthme reste actuellement fondé sur l’anamnèse, l’examen clinique et les explorations fonctionnelles respiratoires. Le test à la méthacholine a un intérêt en cas de probabilité intermédiaire chez des patients ayant des symptômes d’asthme « atypiques » avec une spirométrie et une réversibilité normales(1). La question de savoir s’il faut le faire en première intention ou après un traitement d’épreuve demeure sans réponse à ce jour. Dans l’asthme professionnel, des mesures répétées de l’HRB à la méthacholine doivent être réalisées en période d’activité professionnelle et en période de congés. La valeur prédictive négative de cette exploration est élevée (97 %). De ce fait, l’absence de réponse chez un sujet exposé élimine le diagnostic.
LES TESTS DE PROVOCATION BRONCHIQUE INDIRECTS
Le test d’hyperventilation isocapnique dure 6 minutes avec un objectif de ventilation à 60 %-85 % de la ventilation volontaire maximale (selon l’âge), l’inhalation d’un mélange d’air sec enrichi en gaz carbonique (5 %)(2). Le test d’exercice consiste à pédaler sur un cyclo-ergomètre dans une ambiance d’air sec pendant 8 minutes avec une ventilation ou une fréquence cardiaque cible à atteindre en 2 minutes, puis en 6 minutes d’exercice. Lors de ces deux tests indirects, une spirométrie est réalisée après 5, 10, 15 et 20 minutes. Ils partagent le même critère de positivité, à savoir une chute du VEMS de 10 % ou plus.
Les tests indirects sont utiles dans l’exploration du bronchospasme induit par l’exercice (BIE). Leur sensibilité pour détecter un BIE avec asthme, qui reflète un mauvais contrôle, est moins bonne que celle de la méthacholine. Ils sont en revanche plus spécifiques : la mise en évidence d’une bronchoconstriction lors d’un test indirect est en faveur d’une maladie asthmatique. Le BIE sans asthme correspond à une obstruction bronchique transitoire consécutive à un exercice physique survenant habituellement après l’arrêt de l’effort. Il s’agit d’une entité fréquente chez les sportifs de haut niveau, notamment les skieurs de fond et les patineurs. Beaucoup plus sensibles que le test à la méthacholine, les tests de provocation indirects sont indiqués en cas de symptômes isolés à l’exercice. Ils ont une place particulièrement importante dans l’exploration du BIE sans asthme chez les athlètes chez lesquels ils sont recommandés, y compris par le comité olympique international.
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