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Asthme

Publié le 25 juin 2024Lecture 5 min

Reconnaître et prendre en charge un asthme sévère

Denise CARO, d’après un symposium avec Gilles Devouassoux (Lyon), Philippe Bonniaud (Dijon), Luc Colas(Nantes) et Elie Serrano (Toulouse)

Au fil du temps, des progrès substantiels ont été faits dans la compréhension des mécanismes qui sous-tendent les différents phénotypes d’asthme et dans les traitements à leur opposer. La mise en évidence du rôle joué par l’inflammation T2 a largement participé à ces avancées.

En 2021, les recommandations françaises pour la prise en charge de l’asthme chez les plus de 12 ans ont été réactualisées par la Société de pneumologie de langue française (SPLF) et la Société pédiatrique de pneumologie et d’allergologie (SP2A)(1). « Outre la prise en charge allergologique indispensable avec l’éviction des allergènes en cause et éventuellement la réalisation d’une immunothérapie allergénique, le traitement de fond de l’asthme repose sur la corticothérapie inhalée (CSI) à doses progressives en fonction de la réponse au traitement et les bronchodilatateurs de longue action BDLA, a rappelé le Pr Philippe Bonniaud (Dijon). La notion de contrôle est essentielle. » L’appréciation du patient sur son état est très subjective. Une étude a montré que la majorité des asthmatiques disent aller très bien ou assez bien, alors que 3 sur 4 ont un asthme non contrôlé(2). Il faut vérifier la qualité de la prise des CSI et évaluer l’observance du traitement en se méfiant de la corticophobie de certains patients. Près de la moitié des asthmatiques avec une corticothérapie orale ne prend pas son traitement(3). « Un asthme difficile est un asthme non contrôlé malgré le traitement CSI maximal, a déclaré le Pr Bonniaud. Encore faut-il avant de l’affirmer avoir éliminé les diagnostics différentiels, optimisé la prise en charge (ETP), recherché des facteurs contribuant aux symptômes, aux exacerbations (syndrome hyperventilation associé, dysfonction des cordes vocales, iatrogénie). Si après vérification et optimisation de la prise en charge l’asthme reste mal contrôlé, il est dit sévère. » 24 % des asthmatiques ont un traitement avec de fortes doses de CSI+LABA ou une dose moyenne CSI+LABA et des corticoïdes oraux (CO), 17 % sont des asthmes difficiles à traiter et 3,7 % sont réellement des asthmes sévères(4). Ces asthmes sévères pourront éventuellement bénéficier d’une biothérapie dont l’indication ne sera discutée qu’après avoir phénotypé le type d’asthme en présence.   LE RÔLE CENTRAL DE L’IL-5   « L’asthme est une maladie hétérogène, a expliqué le Dr Luc Colas (allergologue, immunologiste Nantes). Le phénotype avec une inflammation T2 est majoritaire chez les patients allergiques mais aussi chez les asthmatiques non allergiques. » Il est associé à une élévation du taux d’IgE totales et de la FeNO et à la présence d’éosinophiles dans les expectorations(5). L’IL-5 fait partie des stigmates de l’inflammation T2. Elle est secrétée par l’épithélium en réaction aux antigènes. Elle stimule la production d’éosinophiles ; c’est une cytokine-clé pour l’éosinophile et l’augmentation du taux d’éosinophiles dans le sang ou les bronches est un indicateur de la sécrétion d’IL-5(6) . Une étude danoise a montré une corrélation entre le taux d’éosinophiles circulants etle déclin du VEMS chez les asthmatiques et les patients BPCO. Cela suggère que l’éosinophile est une cible thérapeutique dans ces maladies bronchiques qui évoluent et qui sont fortement impactées par l’environnement(7). Les effets de l’IL-5 chez l’asthmatique ne se limitent pas à la production et l’activation des éosinophiles. Elle relâche les jonctions de l’épithélium, elle favorise la formation de bouchons muqueux hautement inflammatoires, elle active la transformation des fibroblastes en myofibroblastes impliqués dans le remodelage bronchique. Ainsi, quand on bloque l’IL-5, on améliore les jonctions épithéliales, on diminue la formation des bouchons muqueux (bon reflet de la fonction respiratoire) et on freine le remodelage bronchique. Il est possible qu’on ait même un effet « reverse »(8,9). En effet, la réalisation de fibroscopies bronchiques chez des patients asthmatiques sévères traités pendant un an par un anti-IL-5, le mépolizumab, a mis en évidence une diminution de l’épaisseur de la paroi bronchique(10). Observation confirmée par les résultats préliminaires de l’étude MESILICO qui montre la restauration de la fonction épithéliale, une réduction des dépôts de collagènes et une diminution de l’épaisseur du muscle lisse dans les bronches d’asthmatiques sévères traités par mépolizumab(11). D’autres biothérapies ont des effets similaires. Le benralizumab et le dupilumab agissent sur les bouchons muqueux et les éosinophiles(12-14). Le tézépélumab diminue les bouchons muqueux, les éosinophiles et la transition myofibroblastique(15-17). L’omalizumab agit lui aussi sur ce dernier paramètre(18).   DE L’ASTHME À POLYPOSE NASO-SINUSIENNE   Il y a un continuum entre les bronches et les voies aériennes supérieures et on retrouve une inflammation T2 dans la polypose naso-sinusienne (PNS) qui partage certaines de ses caractéristiques avec l’asthme(19). L’une d’elles est le rôle clé joué par l’IL-5 qui favorise la croissance, la différenciation, la survie et le recrutement des éosinophiles dans les polypes. Elle est responsable de l’œdème, du remodelage, de l’inflammation et de la pérennisation de l’altération de la barrière épithéliale. Les PNS avec des éosinophiles sont plus sévères et sont plus souvent associées à un asthme. « Asthme et PNS sont des phénotypes différents d’une même maladie », a affirmé le Pr Elie Serrano (ORL, Toulouse). Un patient avec une PNS a un risque multiplié par 7,5 de développer un asthme(20). Comme pour l’asthme, le traitement dépend de la sévérité des symptômes qu’il est important de hiérarchiser et de scorer. La SFORL a proposé en 2023 un algorithme thérapeutique. En première intention sont prescrits des lavages de nez et des corticoïdes locaux. Lors de poussées on peut avoir recours aux corticoïdes oraux en cures courtes. Plus de deux cures par an correspond à une PNS sévère. La réponse thérapeutique est évaluée à 6 mois. Si la PNS n’est pas contrôlée, on discute de l’indication chirurgicale (ethmoïdectomie) tout en poursuivant les traitements locaux. En cas d’échec de la chirurgie, une biothérapie peut être envisagée si au moins 3 des 5 critères suivants sont remplis : Inflammation T2 (éosino > 250 ou IgE totales > 100) ; +2 cures CO/an ; altération significative de la QV SNOT22 > 40 ; perte significative de l’odorat ; diagnostic de comorbidité asthmatique avec des CSI réguliers(21). Actuellement en France, trois molécules ont l’AMM dans la PNS (omalizumab, dupilumab, mépolizimab), deux sont remboursées dans le cadre des médicaments d’exception (dupilumab, mépolizimab). Le benralizumab est en phase III de développement. D’après un symposium organisé avec le soutien du laboratoire GSK, modéré par le Pr Gilles Devouassoux (Lyon) et avec la participation du Pr Philippe Bonniaud (Dijon), du Dr Luc Colas(Nantes) et du Pr Elie Serrano (Toulouse) CFA 2024

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