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BPCO

Publié le 18 nov 2008Lecture 15 min

La réhabilitation respiratoire dans la BPCO : indispensable et efficace

P. MOURET, Centre régional d’éducation physique et sportive (CREPS), Reims
La réhabilitation respiratoire (RR) est un ensemble de soins personnalisés dispensés aux patients atteints d’une maladie chronique respiratoire par une équipe transdisciplinaire. Ses objectifs sont d’améliorer les capacités, d’optimiser les conditions physiques et psychosociales, de diminuer les coûts. Elle a fait la preuve de son efficacité, au moins pour la BPCO.
En 1996, la méta-analyse de Y. Lacasse et al. (1) recommandait « fortement, comme élément de prise en charge des BPCO, un programme de réhabilitation incluant au moins 4 semaines de réentraînement à l’effort ». Actuellement, elle constitue un élément majeur du traitement de la BPCO par l’amélioration des capacités d’exercice, de la qualité de vie et la diminution de la sensation de dyspnée, du nombre d’exacerbations, de journées d’hospitalisation mais aussi de l’angoisse et la dépression associées (2).     La méta-analyse de M.A. Puhan et al. (3) a mis en évidence « un effet pertinent sur la qualité de vie » et surtout une diminution du risque de décès au cours du suivi (risque relatif : 0,45, IC95%: 0,22-0,91). Par ailleurs, la RR a un impact économique positif : diminution des coûts de santé ; diminution du nombre des arrêts de travail (4).   LES MALADIES RESPIRATOIRES CHRONIQUES ONT UN COÛT TRÈS ÉLEVÉ POUR LA SOCIÉTÉ : QUELQUES CHIFFRES RELATIFS À LA BPCO • Trois à 4 millions de patients en France (6 à 8 % de la population adulte) ; • 4e cause de mortalité dans le monde (3e en 2020 pour l’OMS) ; • 16 000 décès en France en 2005 (ministère de la Santé) ; • le coût médico-économique direct de la BPCO est estimé à 3,5 milliards d’euros/an.   La rr, élément indispensable de la prise en charge de la bpco, la dyspnée ou l’intolérance à l’effort   La RR améliore la qualité de vie (grade A de l’Anaes). Elle est organisée en programme multidisciplinaire intéressant divers aspects de la maladie : le déconditionnement à l’effort, mais aussi l’anxiété et la dépression, la dénutrition ou l’obésité, l’éducation thérapeutique et l’encombrement.   BPCO et déconditionnement. Elle est proposée à des patients motivés et ayant un traitement optimisé. Elle doit s’accompagner d’un programme de sevrage tabagique pendant le stage de RR pour les patients encore fumeurs actifs. La RR est efficace quel que soit son lieu de réalisation. Au cours de la RR, le réentraînement des membres inférieurs est indispensable. Les contenus médicaux et médicosociaux de ces programmes doivent être individualisés. Cependant, avant d’entreprendre ce programme, une épreuve d’effort à charge croissante est recommandée et la poursuite du réentraînement en postcure doit être maintenu. À qui la proposer ? Aux patients BPCO • Stades II, III et IV (Gold, 2007); • en état stable ou au décours d’une exacerbation ; • motivés ; • ayant, malgré une prise en charge optimale de leur maladie, une incapacité et/ou un handicap respiratoires évaluables : – une dyspnée ou une intolérance à l’exercice, – une perte d’autonomie et/ou une réduction de leurs activités quotidiennes sociales en relation relation avec leur maladie ou l’altération de leur état de santé ; • mais aussi à des patients sous oxygène. Il n’existe pas de critère fonctionnel objectif incitant à engager un patient en RR. La prescription d’une RR est déterminée à partir des symptômes et de l’incapacité fonctionnelle. Aux enfants et adolescents asthmatiques S’il existe : • un déconditionnement ; • une réduction de l’activité générale ; • une perte de confiance en soi ; • une angoisse, des entraves à la vie sociale. Aux patients atteints d’asthmes persistants et sévères Associée à la kinésithérapie respiratoire, la RR est utile pour lutter contre l’hypersécrétion. Elle aura pour objectif de donner aux patients une meilleure qualité de vie et une plus grande autonomie. Aux patients atteints de mucoviscidose Des tentatives vont être entreprises pour instituer un réentraînement à l’effort au domicile des patients sous contrôle du kinésithérapeute et du pneumologue.   LES CONTRE-INDICATIONS DE LA RÉHABILITATION RESPIRATOIRE • Insuffisance coronaire instable ou infarctus récent. • Sténose aortique. • Myocardite, endocardite ou péricardite active. • Maladie infectieuse et/ou fébrile en cours. • Maladie thromboembolique (thrombophlébite ou embolie récente). • Troubles du rythme non contrôlés. • Tachycardie > 100 battements par minute non contrôlée. • Insuffisance cardiaque congestive symptomatique. • Hypertension artérielle primitive. • Diabète non contrôlé. • Déplacement du segment ST à l’électrocardiogramme de repos de plus ou de moins 3 mm. Où la pratiquer ? La RR peut être réalisée en hospitalisation complète ou hospitalisation de jour, en ambulatoire ou au domicile pour les patients motivés et dont l’état le permet. Le choix va dépendre de l’évolution de l’état du patient, de l’évaluation préalable, de la motivation du patient et des possibilités locales. Ainsi, pour un patient présentant une BPCO instable et/ou ayant des pathologies associées, des problèmes sociaux, psychologiques ou au décours d’une exacerbation avec hospitalisation, la RR en milieu hospitalier est préférable.   Travail global endurant. L’efficacité de la RR dépend plus du contenu du programme que du lieu de réalisation. L’hospitalisation complète présente l’avantage de réunir sur le même site et en une seule équipe tous les intervenants. Le patient est intégré dans un groupe, ce qui est un autre avantage du point de vue de la motivation et de la socialisation. Les soins sont quotidiens et étalés sur la journée. Elle s’adresse aux malades les plus graves. En revanche, elle a pour inconvénient un coût élevé, le petit nombre de centres, mais aussi les difficultés du retour dans l’environnement socio-familial du patient. La durée moyenne du séjour est de 20 à 30 séances réparties en 4 à 6 semaines. L’hospitalisation de jour offre l’avantage de ne pas couper le patient de son milieu familial, de lui permettre de continuer son activité professionnelle tout en ayant accès au même type d’équipe et d’accueil que précédemment. Par ailleurs, le forfait d’hébergement et la durée moyenne de séjour sont réduits (25 séances). Inconvénients : le petit nombre de centres ; de plus, le centre ne doit pas être éloigné de plus de 30 km du domicile du patient. La RR en ambulatoire dans une structure de proximité présente plusieurs avantages pour le patient (proximité du domicile, présence de son pneumologue, maintien possible d’une activité professionnelle, possibilité d’un suivi à long terme, compliance favorisée et coûts moins élevés). La RR s’établit sur 25 séances de 2h30 dont 45 minutes de réentraînement à l’effort contrôlé et personnalisé, de la kinésithérapie respiratoire quotidienne et de l’éducation à la santé. La RR à domicile permet au patient de ne pas être coupé de son environnement habituel. Dans ce cas, la motivation doit être claire et les objectifs bien définis. Par ailleurs, la compliance au traitement n’est pas assurée et l’on rencontre des difficultés d’organisation et des problèmes de matériel.   Moyens complémentaires : la gymnastique. L’évaluation préalable Il s’agit d’un temps essentiel, car de lui va dépendre l’intensité d’entraînement du sujet pendant la RR. Évaluation clinique • Mesures anthropométriques ; • détermination de l’indice de masse corporelle (IMC). Évaluation fonctionnelle de repos • Courbe débit-volume, mesure des volumes statiques (CPT, CRF, VR, CV) ; • test de bronchodilatation ; • test de diffusion (test du CO en apnée) ; • test de provocation pour les asthmatiques. Test de marche de 6 minutes • Il permet d’évaluer les bénéfices de la RR sur la capacité fonctionnelle ; ainsi, dans la méta-analyse de Y. Lacasse, l’effet global de la RR est de 55,7 m (27,8-92,8) sur la distance parcourue en 6 minutes; • il doit se réaliser selon les recommandations de l’ATS dans un couloir de 30 mètres, sous forme d’allers-retours avec demi-tours autour d’un plot ; • le résultat en est la plus grande distance parcourue en 6 minutes (exprimée en mètres) ; • ce test permet en outre de surveiller la saturation du sujet pendant l’effort. Épreuve d’effort Elle s’effectue à charge croissante avec mesure des gaz artériels avant et en fin d’effort. Elle permet : • de faire le bilan de l’état du patient avant sa RR et ainsi de pouvoir mesurer les bénéfices acquis à la fin de cette dernière; • d’éliminer une contre-indication ou de mettre en évidence une pathologie associée (cardiovasculaire…) ; • d’estimer la sévérité du déconditionnement à l’effort, véritable maladie secondaire ; • de déterminer la fréquence cardiaque cible (celle du seuil ventilatoire) et ainsi d’individualiser l’intensité du réentraînement ; • d’estimer la sévérité de la maladie respiratoire, par exemple pour une BPCO de mettre en évidence une hypoxémie et/ou une désaturation à l’effort qui conduira à une oxygénothérapie de déambulation. Éducation thérapeutique Elle cible les objectifs dits de «sécurité» : traitement habituel, auto-surveillance, conduites à tenir adaptées afin d’aboutir à une «automédication rationalisée ». Sa mise en place est difficile : il faut prévoir des séances programmées accessibles et dans un lieu privilégié pour certains patients.   ACQUÉRIR L’AUTONOMIE, C’EST : • Savoir ce que l’on doit faire ; • avoir les compétences nécessaires pour pouvoir le faire ; • vouloir le faire. Pour parvenir à l’autonomie du patient, il est nécessaire de l’aider à travailler l’acceptation de sa maladie et ses motivations au traitement, en tenant compte de la culture médicale propre du patient. Si le traitement est mieux compris, il sera mieux suivi, avec une meilleure prise en charge personnelle des « à-coups de la maladie ».  Par ailleurs, il s’agit d’aider le patient et son entourage à acquérir les compétences nécessaires pour changer son mode de vie, gérer sa vie quotidienne avec son handicap respiratoire, son angoisse et sa dyspnée. La RR devra répondre aux questions telles que : qu’attend le patient de sa RR ? Qu’a-t-il prévu après ? La possibilité d’une reprise du travail a-t-elle été envisagée ? Éducation nutritionnelle Le poids est rarement normal chez les patients insuffisants respiratoires chroniques (obésité ou dénutrition). La faiblesse des muscles respiratoires s’aggrave en cas de déficit métabolique (magnésium, calcium, potassium, phosphore) ; la correction de leurs déficits permet une amélioration des déficiences des muscles respiratoires. Chez les obèses, le coût métabolique des activités physiques et même de la respiration est accru. Cet accroissement est lié à la surcharge pondérale. La dénutrition induit la perte de masse maigre au niveau des muscles respiratoires et périphériques avec, comme corollaire, une perte de force. La pesée s’effectue régulièrement avec une balance impédance-métrique pendant la RR (une perte de 5% de masse maigre doit obligatoirement entraîner un réajustement de la prise en charge diététique). Il est conseillé pour ces 2 types de patients : un rééquilibrage de l’apport nutritionnel (essentiel), avec parfois, chez les dénutris, un apport protéique supplémentaire. Apport psychologique Cette dimension est nécessaire, car, chez ces patients, l’anxiété est souvent présente ; une métaanalyse portant sur 101études retrouve un état dépressif dans la plupart des maladies chroniques. L’identification de ces pathologies se fera à partir de questionnaires spécifiques (Hospital Anxiety and Depression scale [HAD]). Il s’agit de travailler sur l’acceptation de la maladie et/ou de ses traitements, sur une éventuelle perte de statut d’invalide social en cas de récupération de l’autonomie, sur l’angoisse générée par la dyspnée avec des techniques de relaxation. Enfin, il faut rendre le patient moins passif vis-à-vis de sa maladie et améliorer sa confiance en lui (techniques cognitivo-comportementales). Les moyens utilisés sont les consultations individuelles, les groupes de paroles et les techniques de relaxation en individuel et/ou en groupes. En fait, il s’agit de se servir du stage en RR pour améliorer l’anxiété et la dépression. Une prise en charge multidisciplinaire Si l’arrêt de l’intoxication tabagique n’a pas été obtenu, il est nécessaire d’obtenir un engagement à profiter du stage de RR pour arrêter de fumer. La prise en charge sera psychologique, nutritionnelle, kinésithérapique avec réentraînement à l’effort et comportera une éducation thérapeutique. La prescription prendra en compte le dossier pour éliminer toute contre-indication absolue et les événements survenus pendant le test d’effort préalable. Il faut définir le type d’exercice (s), l’intensité de la pratique, la durée, la fréquence, le format des sessions d’exercices, tout en tenant compte des possibilités de temps de chacun.   LES EXERCICES DE RECONDITIONNEMENT À L’EFFORT • Durée du stage : 8 à 12 semaines. • Durée des séances : 30 à 45 minutes minimum. • Fréquence : 3 à 5 fois par semaine. • Intensité : fréquence cardiaque cible (déterminée par la FC au seuil ventilatoire). • Total des séances : 20 à 30 séances au minimum. • Privilégier les activités de type endurance. Reconditionnement à l’effort aérobie : marche, escaliers, cycloergomètre, kinébalnéothérapie en tenant compte des goûts et des motivations du patient mais aussi du possible réinvestissement de l’activité choisie dans la vie quotidienne.   Travail aérobie sans résistance Les exercices musculaires sont habituellement isotoniques, aérobies et rythmiques, utilisant une masse musculaire importante et large. En général, on utilise peu les exercices de type isométrique. Les sessions d’exercice sont aérobies ++ et doivent comporter un échauffement et une diminution progressive de l’effort. Il est utile de faire suivre les exercices par des activités autres (force…). Les exercices de mobilisations segmentaires sont coordonnés avec la respiration diaphragmatique. Les membres inférieurs Ces exercices sont indispensables, les patients BPCO ayant une atteinte de la force et de l’endurance du quadriceps, associée à une fatigabilité très importante. Pour éviter la dyspnée, le patient se déconditionne à l’effort, puis devient sédentaire, ce qui a pour conséquence une régression de la voie métabolique aérobie au profit de la voie anaérobie lactique (activation de la glycolyse anaérobie). La voie anaérobie produit de l’acide lactique, tamponné par les bicarbonates avec production excédentaire de CO2 induisant une hyperventilation ; cette dernière augmente la sensation de dyspnée et va inciter le patient à diminuer son activité (cercle vicieux du déconditionnement). Au niveau musculaire, cela se traduit par une réduction des capacités oxydatives, une diminution du pourcentage de fibres de type I par rapport aux fibres de type II, une diminution de la microcirculation, du nombre de mitochondries et de l’activité enzymatique oxydative (30% environ). Le réentraînement des membres supérieurs est recommandé Pour un travail identique des membres supérieurs, les études ont montré une amélioration de la ventilation. Une amélioration de la VO2max, de la force et de l’endurance des membres supérieurs ont été retrouvés lors de comparaisons de patients avec ou sans exercices. Le travail en résistance avec musculation segmentaire s’effectue en aérobie avec légère résistance (bandes élastiques, poids léger, résistances à chaque fois individualisées selon le patient. On proposera également le travail en piscine ou en salle (gymnastique, gymnastique respiratoire, relaxation). L’approche est la même pour l’asthme, globale et multidisciplinaire La RR comporte une éducation thérapeutique : meilleure connaissance des mécanismes de sa maladie et de ses traitements favorisant une meilleure prise en charge et un réentraînement physique régulier. Les objectifs sont la régularité (particulièrement chez l’enfant) pour obtenir des bénéfices physiologiques et de qualité de vie et l’intégration de cette pratique à long terme pour reprendre peu à peu confiance en soi et dans ses capacités. Il faut s’assurer de l’état des bronches du patient avant de débuter un effort (mesure au débitmètre de pointe). Après un début progressif (s’échauffer comme un sportif), il s’agit d’obtenir un développement physique optimal du poumon et de la cage thoracique (pour éviter au maximum les déformations), la respiration abdominale étant rythmée sur l’exercice physique. L’entraînement s’effectue en endurance au niveau du seuil ventilatoire (ou de dyspnée) avec et pour un confort ventilatoire, et en variant les activités physiques pratiquées, dans un esprit ludique et convivial. Ces exercices sont nécessaires pour remettre en route la voie métabolique aérobie, retarder la participation de la voie anaérobie lactique et l’apparition du seuil ventilatoire et donc de la dyspnée. Y a-t-il un « après-rr » ? Il faut encourager la poursuite des activités physiques pratiquées de façon régulière, au domicile avec un cyclo-ergomètre à disposition ou chez le kinésithérapeute, voire au sein d’une association de patients ou dans un club sportif encadré d’éducateurs médico-sportifs.

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