Publié le 28 jan 2009Lecture 5 min
Asthme sévère : Quelles explorations ?
Dr J.de Blic
La prise en charge d’un asthme sévère nécessite, on l’a vu, un certain nombre de conditions — avoir éliminé les faux asthmes ; avoir pris en charge les éventuels facteurs aggravants — et que l’observance thérapeutique ait été évaluée. Les faux asthmes Les principaux diagnostics différentiels à évoquer sont résumés dans le tableau 1. Tableau 1. Diagnostic différentiel de l’asthme de l’enfant et du nourrisson. • Obstruction proximale – Corps étranger – Sténose trachéale ou bronchique – Malformation broncho-pulmonaire – Tumeurs bénignes ou malignes – Anomalies des arcs aortiques, artère pulmonaire gauche anormale – Trachéo/bronchomalacie • Obstruction distale – Mucoviscidose – Bronchodysplasie pulmonaire – Dyskinésie ciliaire primitive – Séquelles de pneumopathie virale • Pathologie d’inhalation – Fistule oeso-trachéale – Fausses routes – Reflux gastro-oesophagien – Dilatation des bronches – Déficits immunitaires (humoral essentiellement) – Pathologie interstitielle chronique (nourrisson surtout) – Poumon éosinophile – Cardiopathie congénitale avec shunt gauche droit – Insuffisance cardiaque – Déficit en alpha1 antitrypsine – Dyskinésie des cordes vocales (adolescente essentiellement) – Syndrome d’hyperventilation Les obstacles proximaux sont plus fréquemment en cause chez le petit enfant. Chez le grand enfant, il ne faut pas se laisser piéger par une sténose trachéale ou une anomalie des arcs aortiques. Un antécédent d’hospitalisation pour une pneumopathie sévère avec des images en mosaïque alternant des zones hyperclaires et des zones de densité normales suggère des séquelles de virose (figures 1a et 1b). Figures 1a et 1b. TDM thoracique montrant des images en mosaïques dans le cadre d’une séquelle grave de virose respiratoire. Également, et surtout chez une adolescente, une symptomatologie respiratoire fonctionnelle riche contrastant avec une saturation normale doit faire évoquer une dyskinésie des cordes vocales avec une adduction inspiratoire et expiratoire des cordes vocales. Ainsi, les clichés de thorax en inspiration et expiration, un scanner thoracique et l’endoscopie bronchique participent au diagnostic différentiel. Asthmes non contrôlés mais contrôlables À côté des faux asthmes, existent les asthmes que l’on peut qualifier de non contrôlés mais contrôlables grâce à la prise en charge des facteurs aggravants : – recherche et traitement d’un reflux gastro-oesophagien ; – prise en charge d’une rhinite allergique (dont on sait qu’elle est un facteur de mauvais contrôle de l’asthme) ou d’une sinusite ; – réévaluation du contrôle de l’environnement, recherche d’une allergie alimentaire masquée ; – lutte contre un tabagisme passif ou actif chez les plus grands ; – prise en charge d’un surpoids ; – dépistage de situations de stress aigus ou chroniques ; – limitation des infections virales. L’observance Figure 2. Biopsie bronchique au cours d’un asthme sévère montrant un épaississement de la membrane basale témoin du remodelage des voies aériennes. Il est essentiel de l’évaluer. Comme pour les autres maladies chroniques, l’observance est mauvaise puisqu’elle ne dépasse pas 50 %. L’inobservance est certainement le premier facteur de noncontrôle de l’asthme, démontrant en retour l’effet bénéfique des traitements réguliers dans le traitement au long cours de l’asthme de l’enfant. L’observance diminue avec l’âge jusqu’à l’adolescence. L’évaluation de l’observance reste cependant difficile en l’absence de critères objectifs. Évaluer l’inflammation et le remodelage Lorsque tous ces éléments sont pris en compte — ce qui nécessite bien souvent plusieurs semaines de suivi régulier —, l’asthme est réellement non contrôlé malgré un traitement optimal et un avis spécialisé est souhaitable. La prise en charge passe désormais, d’une part, par un test aux corticoïdes per os pendant 2 semaines pour apprécier la réversibilité d’une obstruction et/ou des symptômes et, d’autre part, par l’évaluation de l’inflammation et du remodelage des voies aériennes. ● L’évaluation directe repose sur l’analyse du lavage bronchoalvéolaire et surtout des biopsies endobronchiques qui sont réalisées au cours de l’endoscopie. Les principaux résultats des biopsies montrent que les phénomènes inflammatoires (augmentation du nombre de polynucléaires éosinophiles et neutrophiles intraépithéliaux et du nombre de mastocytes sous-muqueux et au sein des muscles lisses) sont corrélés aux symptômes ; en revanche, hormis l’épaississement de la membrane basale, les anomalies structurales de remodelage (hypertrophie/ hyperplasie du muscle lisse, hyperplasie myofibroblastique, hypertrophie des glandes à mucus, angiogenèse), sont plus corrélées au degré d’obstruction bronchique (figure 2). ● Évaluation indirecte Différents techniques indirectes sont par ailleurs en cours d’évaluation : corrélation entre le NO expiré et inflammation/remodelage ; mesure de différents marqueurs dans l’expectoration induite (limitée chez l’enfant par la lourdeur technique) ou le condensât exhalé (en cours de standardisation) ; évaluation des remaniements structuraux associés à l’asthme par tomodensitométrie. L’intérêt de ces techniques est de mieux comprendre la physiopathologie de l’asthme sévère. On peut imaginer que chez un enfant symptomatique avec une inflammation importante démontrée sur les biopsies bronchiques, il sera nécessaire d’augmenter la pression anti-inflammatoire. À l’inverse, chez un enfant peu symptomatique avec peu de signes inflammatoires mais des signes de remodelage important, l’augmentation de la pression antiinflammatoire peut être plus délétère que bénéfique. Il est cependant encore trop tôt pour appliquer ces schémas dichotomiques et bien d’autres études sont encore nécessaires.
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